Ce matin, le fond d’air est froid. Des plaques de glaces se sont constituées sur la grande retenue d’eau. Le sol craque sous mes pas, et je peine à sortir la soie tellement ce froid a engourdi mes doigts. Pourrait-on penser que cela m’arrête, sous les volées des migrateurs, sous cette vision splendide d’une fin d’automne ? Je prends avec conviction le chemin de la rive. Je vais devoir redescendre à l’abri des sous-bois pour trouver une eau sans plaque de glace. Aucune activité à la surface, biensûr, vu le manque de luminosité et la desertion d’insectes. Je dois descendre en diamètre ma pointe, et utiliser un bas de ligne long, me lancer vers une pêche à la nymphe à vue. Mon premier choix sera une petite nymphe en faisan, sur hameçon #14.
J’entraperçois des formes sombres qui se déplacent, sans créer de cercles, elles remontent la rivière lentement en ligne droite. Je m’essaye à quelques lancers qui, par ce froid me paraissent gauches. La difficulté lorsque le bras et la main sont engourdis repose à l’allongement du geste, afin de permettre à la nymphe d’être suffisamment en amont de la trajectoire et à une profondeur satisfaisante à la vue du salmonidé. En théorie, et je dis bien en théorie, je pensais réussir à entrevoir des trajectoires vers mon imitation. Cette dernière descendant lentement, ou animée ne paraît pas être attrayante. J’insiste, j’affine mes lancers en m’équipant des mes lunettes polarisantes, je scrute jusqu’à la limite du plancher sombre à 60cm sous la surface. Rien y fait, je n’ai qu’une seule attaque en deux heures…
Parfois, l’insistance déraisonnée démontre notre perte d’objectivité. Après avoir libérée cette truite, je me décide à aller plus loin sous la surface d’eau, malgré une section fluo précédent mon micro-anneau, je ne parviens pas à voir correctement les attaques. Je veux sonder les limbes et pour cela, j’ajoute un sedge indicateur, placé à un bon mètre d’une nouvelle nymphe. J’ai le choix entre deux indicateurs, soit une tabanas au corps orangé et une aile beige, ou un ducky hog hopper avec un thorax rouge sous une aile de cervidé blanchâtre. La nymphe devient bien plus foncée, car je n’ai plus besoin de la guetter, je la choisie sans aucun lestage. Je m’intéresse aux bordures, où il y a peu de chemin d’homme les longeant, dans les zones abritées sous un arbre.
Le succès est immédiat, l’indicateur plonge rapidement, après la disparition de la nymphe dans les profondeurs de la rivière. Le jeu est attrayant et je poursuis mon chemin vers chacun des abris repérés. Le goût de l’échec s’est estompé, car cette prise si rapide m’a ragaillardi.
Un beau récit d’hiver
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